C'est encore et toujours le même sentiment de panique, le même climat de débandade, de débâcle généralisée qui règne dans les salles de marché. Du jamais-vu. A côté, les krachs de 1987 et de 1989, la crise asiatique de 1998 et la faillite du hedge fund LTCM la même année, l'explosion de la bulle Internet en 2000, les attentats du 11-Septembre apparaissent comme des secousses bien légères.
Et les pouvoirs publics ne font toujours pas ce qu'il faut pour les rassurer. Les informations selon lesquelles Paris avait l'intention de proposer un plan de sauvetage des banques du Vieux Continent, une sorte de plan Paulson à l'européenne, a semé un grand trouble.
La taille envisagée - de 300 à 350 milliards d'euros - est d'abord venue démontrer à quel point les banques européennes sont elles aussi intoxiquées. Le rejet catégorique par le gouvernement allemand - pas par les banquiers allemands - d'un tel plan a aussi étalé au grand jour les faiblesses structurelles de la zone euro et la difficulté des Européens à trouver une réponse collective forte à la crise bancaire qui les secoue.
Tout cela avait de quoi faire baisser l'euro, ce qui s'est produit. La monnaie unique est passée sous la barre des 1,40 dollar, un recul qui s'est accentué, jeudi 2 octobre, après la décision de la BCE de maintenir inchangés ses taux directeurs. L'euro a terminé vendredi soir à 1,3772 dollar, contre 1,46 une semaine auparavant.
Beaucoup avaient cru - espéré - que la BCE allait faire un geste fort pour secourir le système bancaire au bord du gouffre en abaissant sensiblement ses taux directeurs. Elle a certes assoupli son discours mais pas sa politique monétaire. M. Trichet s'est contenté de dire que l'option d'une baisse des taux avait été évoquée, mais pas retenue. Il y avait quelque chose d'un peu irréel à l'écouter évoquer les risques inflationnistes et les effets de second tour sur les salaires alors que circulaient au même moment des rumeurs de faillite de grandes banques européennes.
Le président de la BCE a toutefois souligné que l'institut d'émission était prêt à agir à tout instant, en dehors des réunions du conseil. Certains analystes en ont déduit que la BCE agira dans les tout prochains jours, une fois le plan Paulson adopté et passée la réunion des dirigeants du "G4" (France, Allemagne, Grande-Bretagne, Italie), qui se tenait samedi à Paris.
Quoi qu'il en soit, l'heure est désormais à la baisse des taux en Europe. D'autant que les pressions inflationnistes s'atténuent, aussi vite que la situation économique se détériore. Les prix des matières premières plongent et la récession s'installe. L'Insee prévoit en France un recul du PIB de 0,1 % au troisième et au quatrième trimestre.
"MAUVAISE VOIE"
C'est un beau match qui s'annonce entre les Etats-Unis et l'Europe. Laquelle des deux économies va plonger le plus profondément ?
Le Fonds monétaire international (FMI) donne les Etats-Unis "vainqueurs" de cette course à la récession. Dans un rapport publié jeudi, en conclusion d'une étude sur les crises financières, les experts du Fonds estiment que "la probabilité d'un ralentissement prononcé aux Etats-Unis" était "forte", tandis que la zone euro était "quelque peu à l'abri d'un repli brutal".
Selon les données publiées vendredi, l'économie américaine a détruit 159 000 emplois en septembre, le nombre le plus élevé depuis mars 2003. Les deux candidats à l'élection présidentielle américaine ont immédiatement commenté ce mauvais chiffre. Le démocrate Barack Obama a évoqué la détresse "des millions de familles luttant pour payer leurs factures et garder leur maison". Pour le républicain John McCain, l'annonce des destructions d'emplois "confirme ce que les travailleurs d'Amérique savent depuis des mois : l'économie de notre nation est sur la mauvaise voie". En effet.
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